Tag: Poèmes

Complainte de poète

Le Poète inspiré aspire
Parfois au repos. Comment dire ?
Un vertige venu d’en haut :
Le Poète est à court de mots.

Un nuage gris est sur lui.
Comment marcher dans cette nuit ?
Comment nourrir la flamme obscure,
Cette lueur qui le torture.

Comme il voudrait être une bête !
Ne plus entendre dans sa tête
Ni ces appels, ni ces clameurs
Ni ces poussées vers le bonheur.

Le poète n’est pas un prêtre.
Ni temple ni autel : que l’être
Criant vers un ciel infini.
Poète inspiré et maudit.

Mais le Poète est un emblème,
Comme une croix, souffrance extrême,
Dressée là entre jour et nuit :
Le Poète n’a pas choisi.

Inspiré, il n’est pas prophète.
Il n’est qu’un malheureux poète
Et rien ne sait tenir pour vrai
Sinon le vide qui l’effraie.

Inspiré, il ne l’est pas toujours :
Accablés d’ennui sont ces jours
Où il ne sait trouver les mots
Pour dire l’indicible beau.

Il ne repose pas pourtant :
Il travaille même en dormant,
Obsédé qu’il est de coucher
L’ineffable sur le papier.

On croit souvent qu’il s’émerveille
D’une fleur, du ciel, du soleil.
C’est en lui qu’il voudrait voir clair
Car à lui-même il est mystère.

Poète, tu ne sais retrouver
Ce Jardin dont Dieu t’a chassé.
Poète inspiré, tu es fou
Tes mots toujours de toi se jouent.

— Babylon5


Troisième art poétique

Heureux qui peut reprendre une oeuvre très ancienne
Et lui faire porter un contenu nouveau,
Cherchant à faire mieux que de nombreux rivaux
Ou bien laisser chanter la voix qui est la sienne…

La forme nous inspire et les contenus viennent
(Et c’est surtout par eux que le poème vaut).
On peut passer des jours à ces plaisants travaux
Qui nous font découvrir à quoi nos pensées tiennent.

Un coup de nostalgie, la sagesse de l’huître,
Le bonheur sans argent, l’escargot sur la vitre…
Innombrables pour nous foisonnent les motifs.

Le sujet est présent, prenons garde à la forme,
Mais cela ne va pas être un effort énorme:
Quand le plaisir s’y joint, l’effort est productif.

— Cochonfucius


Le clown

Ding ! Ding ! Dong ! Les dix heures sonnent.
Un triste clown au bout d’un quai
Débite des poèmes niais
Dans l’hiver où rien ne résonne.

Ding ! Ding ! Il les dit pour sa mie.
Ses yeux sont cernés par le deuil :
Elle est partie dans un linceul
Par un neigeux après-midi.

Ding ! Ding ! Dong ! A la cathédrale
On dit des messes pour son âme.
Lui ne verra plus sa femme.
C’était son Temple, son Saint Graal.

Ding ! Ding ! Dong ! Du haut de la tour
Les cloches se font solennelles
Dix heures il est, mais plus pour Elle
Le clown est fou sans son amour.

Ding ! Ding ! Ils ne reviendront plus
Ces jours vivants dans sa mémoire :
Les longs matins, langoureux soirs
De doux baisers sur leurs cous nus.

Ding ! Ding ! Dong ! C’est l’heure finale.
Ce n’est qu’un clown à l’air idiot
Au bout d’un quai léché par l’eau,
Eau de grand fleuve ou de canal.

Ding ! Ding ! Voici qu’un train arrive
Un train d’enfer qui entre à quai :
Wagons d’acier, strident sifflet
Train qui court vers une autre rive.

Train d’enfer : si tu l’emmenais
Sous la neige, sous le goudron,
Loin sous la Terre, tout au fond,
Dans l’oubli perdu à jamais.

Ding ! Ding ! Les cloches carillonnent.
Le bronze et l’airain répercutent
L’horreur bleue d’un esprit qui chute
Loin dans la Terre vermillonne.

Fin pour le clown fou, le clown niais.
Le clown est tombé. Son étoile
Brille au loin dans un ciel sans voiles
Partie, partie, très loin du quai.

— Babylon5


Le regard de Saturne

N’attends pas de la lune une douce chaleur ;
Tu la crois lumineuse, or grisâtre est la sphère
Dont te semble, de loin, voir la blanche couleur,
Qui de sa vraie nature absolument diffère.

Ne crois pas ce poète un homme de valeur ;
Tu le crois inspiré, mon dieu, la belle affaire :
C’est une convulsion qu’inspire une douleur
Qui n’est pas éternelle et n’est pas mortifère.

Un sonnet ne contient aucun sérieux message ;
Un poète n’est pas un savant ni un sage,
Il n’a de sens en lui qu’il ne l’ait détourné.

La lune et la douleur parmi le ciel nocturne
Dansent sous le regard verdâtre de Saturne
Et sans atteindre un but ne cessent de tourner.

— Cochonfucius


Le poème

Le poème c’est un don :
Bouquet sauvage cueilli
Dans la glaise de la vie.
Sans compter nous le donnons.

Le poème est un travail.
Il se fait avec les mots
Ereintés par tant de maux
Pour chanter, vaille-que-vaille.

Le poème c’est un bruit,
Une rumeur, une voix
Qui nous murmure tout bas
Nos désirs inaccomplis.

C’est notre sang si brulant.
C’est ne pas savoir mourir
Sans l’avoir dit, ni redire :
Je suis là, je suis vivant.

le poème, c’est prière,
Dans la prison, dans le chœur
En ce temple de malheur
A genoux dans la poussière.

le poème, c’est l’envol
De notre âme emprisonnée,
Aux jours fades enchaînée,
Pour notre cœur une obole.

le poème est une envie
Une antidote à la mort,
Mort trompeuse en ces décors
Qui sont illusion de vie.

Le poème c’est ivresse
C’est échappée infinie :
Ordre, désordre, Folie,
C’est l’humain qui se redresse.

— Babylon5

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Muse Saturnienne

Dans un triste décor à l’aspect Saturnien

Une Muse esseulée promène son chagrin

Autour d’un lac figé aux couleurs bleu ardoise

Tout près de la rive où de grands cygnes se croisent.

Lentement elle avance. Les longues herbes molles

S’agitent par instant quand un oiseau s’envole,

S’enroulant à ses chevilles fines, ses genoux

Blancs et ronds, pour y déposer un baiser doux.

Perdue sur ces rivages, la muse aux grands yeux bleus

Cherche éperdument quelque ami, quelque dieu,

Ou encore un humain qui voudrait l’écouter :

Pauvre Muse, dans sa robe de lin déchirée !

Pourtant jamais ne reviendra parmi les hommes :

Sa robe est démodée, elle n’est plus, en somme,

Qu’un pâle souvenir rangé dans le grenier

Belle gravure au rayon des antiquités.

Les poètes maintenant ne sont plus guidés

Par une belle Muse à la tête inclinée.

Les poètes bien souvent creusent à mains nues,

Dans le néant des mots, dans le pavé des rues.

Ils écrivent dans des trains, qu’importent les heures,

Ils écrivent souvent parce qu’ils ont trop peur,

Sur leurs ordinateurs, cachés dans leurs bureaux,

Dans des aérogares, sur des quais, des bateaux.

Les poètes n’ont point de cartes ni de plans

Ils écrivent sur du papier toujours trop blanc.

Mais l’un d’eux peut-être, levant les yeux au ciel

Entend chanter et pleurer la Muse éternelle.

Babylon5

— Babylon5


C’est un pays.

Bienvenue dans mon pays…

Dans ce pays très peu lointain,
Personne n’est jamais allé.
C’est un pays, ou ce n’est rien
Qu’une illusion, une fumée.

C’est un pays avec des tours,
Des bois, des châteaux embrumés ;
Des rues très droites, de grandes cours
Et des fermes abandonnées.

Il y a des arbres qui bougent
Avec leurs feuilles tous les soirs
Sur des fillettes en robe rouge
Cherchant leur maison dans le noir.

C’est un pays avec des gens
Qui semblent ne pas voir, et marchent
Sur des trottoir couleur de sang,
Quand on les croise sous les arches.

C’est un pays avec des temples
Au bout d’avenues désertées.
Du haut des flèches vous contemplent
Des sortes d’oiseaux effarés.

C’est un pays mal éclairé,
Par un soleil dont la lueur
Pâle et dorée semble filtrée
Par les yeux frissonnants des fleurs.

C’est un pays tout intérieur,
Chacun y voit sa vérité
C’est un pays dont on a peur
Tant qu’on n’a pas le fond touché.

C’est un pays où l’on rencontre
Des vieillards à double visage,
Sans chapeaux, appuyés tout contre
Les hauts murs donnant de l’ombrage.

C’est un pays peuplé de chiens,
De chevaux furieux, galopant
Sans fers ni cavaliers humains
Sur les silex étincelants.

C’est un pays vide d’écoles,
Un pays où l’on ne fait rien
Tout le jour assis dans l’herbe folle
Que regarder venir demain.

Dans ce pays, le temps est lent.
Il y a des rivières. Elles roulent
Leurs cailloux et poissons d’argent,
Noyés, diamants, sable qui coulent.

Dans ce pays, si l’on y va
On peut par mégarde y rester
Peut-être bien qu’on restera
Sous un cèdre à jamais couché.

Dans ce pays tous les enfants
Jouent entre eux, parlant à voix basse.
Leurs jeux sont peut-être amusants
Mais ils se taisent quand on passe.

C’est un pays où les parents
Ne restent jamais : ils ont peur
De ces enfants aux yeux méchants
Qui déjà ne sont plus les leurs.

Pourtant ce pays a ses charmes
La vie s’y passe étrangement,
Avec des ombres et des drames
Déployés théâtralement.

Il fait bon vivre en ce pays
Pour celui qui n’a plus de pleurs ;
Dans la pénombre qui sourit
On entend des chants et des Chœurs.

C’est un pays qui est profond
Géré par un autre destin
Avec des pentes et des monts
Qui vous ouvrent d’autres chemins.

C’est un pays d’enfants sauvages
D’animaux désobéissants
Un pays sans tenue, peu sage
A rebours du soleil tournant.

C’est un pays, oui, un pays,
Qui en fait n’est pas très lointain
Ceux qui viennent de ce pays
Tiennent leur coeur entre leur mains.

Dans ce pays on ne peut voir
De satellite que le jour :
La lune poursuit sans espoir
Le soleil qui fuit son amour.

Elle est radieuse pourtant,
Plus lumineuse qu’une étoile
Je crois le soleil mécontent
De voir qu’elle lui fait un voile.

Le soleil se sent ridicule
En ce pays trop écarté
Pour que sa lumière ne brule
Avec assez de majesté.

En ce pays, le soir venu,
On est heureux ou on a peur :
Suivant les jours, le temps, l’humeur,
Des amants se promènent nus.

Mais aussi il est certains soirs,
Où les grands bois sont menaçants :
Leurs ombres suivent dans le noir
Ceux qui se sauvent en courant.

C’est un pays qui est selon :
Il y a des sables mouvants,
Mais aussi de jolies maisons
Au fond de jardins florissants.

Dans ce pays, tous les chemins
Montent ou descendent, vers des collines
Peuplées par des peuples anciens
Parlant une langue divine.

Babylon5

(continue reading…)

— Babylon5


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