Dans un triste décor à l’aspect Saturnien
Une Muse esseulée promène son chagrin
Autour d’un lac figé aux couleurs bleu ardoise
Tout près de la rive où de grands cygnes se croisent.
Lentement elle avance. Les longues herbes molles
S’agitent par instant quand un oiseau s’envole,
S’enroulant à ses chevilles fines, ses genoux
Blancs et ronds, pour y déposer un baiser doux.
Perdue sur ces rivages, la muse aux grands yeux bleus
Cherche éperdument quelque ami, quelque dieu,
Ou encore un humain qui voudrait l’écouter :
Pauvre Muse, dans sa robe de lin déchirée !
Pourtant jamais ne reviendra parmi les hommes :
Sa robe est démodée, elle n’est plus, en somme,
Qu’un pâle souvenir rangé dans le grenier
Belle gravure au rayon des antiquités.
Les poètes maintenant ne sont plus guidés
Par une belle Muse à la tête inclinée.
Les poètes bien souvent creusent à mains nues,
Dans le néant des mots, dans le pavé des rues.
Ils écrivent dans des trains, qu’importent les heures,
Ils écrivent souvent parce qu’ils ont trop peur,
Sur leurs ordinateurs, cachés dans leurs bureaux,
Dans des aérogares, sur des quais, des bateaux.
Les poètes n’ont point de cartes ni de plans
Ils écrivent sur du papier toujours trop blanc.
Mais l’un d’eux peut-être, levant les yeux au ciel
Entend chanter et pleurer la Muse éternelle.
Babylon5
— Babylon5